A moins de vivre dans une grotte coupé de toute information, vous avez surement entendu parler du nouveau casque de réalité virtuelle d’Apple, le Vision Pro. Mais concrètement, il vaut quoi ce casque du futur ?
Ce 2 février, Apple a lancé son casque de réalité mixte, le Vision Pro. Les enjeux autour de ce produits sont énormes, car c’est le premier nouveau produit qu’Apple lance depuis l’Apple Watch en 2014. Et l’importance de ce lancement se voit : à New York ce vendredi, tout le gratin du géant de la tech était présent, dont son PDG, Tim Cook, qui est même resté pour discuter avec les gens faisant la file.
La question sur toutes les lèvres, c’est de savoir si on assiste à une nouvelle révolution lancée par Apple, ou est-ce que ce nouveau casque n’est qu’un gadget dystopique qui restera uniquement entre les mains des passionnés de technologie ? Pour avoir un début de réponse à cette question bien épineuse, on a discuté avec quelqu’un qui connait bien la VR et qui a pu tester directement le Vision Pro.
Tom Krikorian fait partie des rares européens à avoir déjà pu mettre la main sur un casque Vision Pro. Il l’a acheté en précommande mi-janvier et l’a récupéré à Boston samedi dernier, le lendemain du lancement officiel. Il avait eu l’occasion de tester le casque en octobre dernier en tant que développeur et il a immédiatement été convaincu. Pour l’ingénieur français, spécialisé en réalité virtuelle depuis plus de 10 ans, le Vision Pro n’a rien à voir avec les autres casques de réalité virtuelle sur le marché.
Le casque de VR le plus abouti du marché ?
L’écran en 4K, le design épuré et travaillé, la qualité du flux caméra en direct, niveau technique le Vision Pro est bluffant. Il semble également avoir résolu un problème récurrent des casques de VR : les nausées, maux de tête, fatigue oculaire et autres effets secondaires sont bien moindres sur le casque d’Apple.
Mais ce qui est le plus impressionnant pour Tom, c’est le tracking des yeux et des mains par le casque pour naviguer dans les applications et agencer les fenêtres autour de soi. “Avec un simple pincement des doigts, je peux sélectionner une fenêtre et la déplacer où je veux. Je suis super libre, je peux aménager mon espace comme je le souhaite. Je ne suis pas limité par le manque d’espace.” Il considère que c’est le premier casque VR avec lequel il peut faire des petites sessions de travail. Il a déjà réussi à l’utiliser pendant environ 2h30 avant de fatiguer.
Cependant, ce n’est pas l’utilisation principale que l’ingénieur voit pour le Vision Pro : “Pour l’instant, je le vois comme un home cinéma de luxe, vu le prix. Je suis impressionné par la vidéo, surtout 3D. Vraiment plus besoin d’aller au cinéma.” Il estime également que le Vision Pro pourrait remplacer de nombreux écrans. “Je peux projeter l’écran de mon Mac en plus grand et avoir d’autres applications sur les cotés : le casque devient un compagnon de mon ordinateur.”
Car, le Vision Pro est totalement intégré dans l’écosystème Apple. Si plus de 600 applications ont déjà été développées ou adaptées spécialement pour visionOS, le système d’exploitation en réalité augmentée du casque, une grande partie de l’Apple Store iPad est également disponible sur visionOS. Les applications ne sont juste pas adaptées à la VR, et prennent donc souvent sous la forme d’une simple fenêtre.
La connexion avec tous les autres périphériques Apple est également prise en charge : partage du wifi, Air Drop, Air Pods pour des appels, connexion à un Mac pour projeter son écran en plus grand dans le Vision Pro, etc. L’interaction entre ses produits a toujours été une grande force d’Apple, et le Vision Pro ne déroge pas à la règle.
“Tout est fait pour que ça soit facile d’utilisation. C’est le premier casque VR qui propose du contenu accessible pour tous. Il y a un immense potentiel de démocratisation de la VR grâce à cet outil.”
Même si Tom admet que la technologie lui rappelle un peu Minority Report, avec ses écrans flottants, ou Ready Player One. “Ça fait un peu dystopique certes, mais le Vision Pro est plus terre à terre. Là où Meta et son Metaverse essaye de nous faire croire qu’on va travailler, jouer, et même vivre toute nos vies dans des univers virtuels. Ça je n’y crois pas trop.”
On voit, depuis le lancement, de plus en plus d’utilisateurs se filmant en train d’utiliser le casque, ce que Tom trouve intéressant. “Les gens postent ça sur les réseaux sociaux avec fierté. Alors qu’avant ce n’était pas le cas. Ici, on voit vraiment l’effet Apple : ils sortent la VR de l’univers geek et ils la rendent sexy.” Il faut tout de même ne pas voir peur du ridicule.
On rappelle quand même que le Vision Pro est destiné à être utilisé chez soi, au bureau ou dans un avion. Se balader dans la rue avec un casque à 3500 $ pourrait en effet être risqué.
Et les points faibles ?
Forcément, le Vision Pro a tout de même des défauts. Tout d’abord, son poids est souvent critiqué. Tom est du même avis. Le casque est assez lourd, ce qui impacte le confort sur le long terme. “La pression du casque laisse des marques sur le visage quand même, mais moins que sur d’autres casques de VR.”
Un problème qui revient souvent également, c’est la batterie : le casque a une autonomie de deux à quatre heures en fonction de l’utilisation. “Sur certains casques, la batterie se trouve à l’arrière, ce qui permet de bien répartir le poids, comme l’Oculus Quest Pro, par exemple. Ici, c’est une batterie externe que tu dois tenir à la main ou mettre dans ta poche, avec un fil qui te suit : c’est un peu chiant et pas optimal.”
Après, le produit est nouveau, il y a donc de nombreux bugs, et les applications optimisées pour le casque ne fonctionnent pas toujours très bien. Nous avons vécu cette expérience en direct lors de notre appel avec Tom : nous avions commencé notre entretien sur Zoom, car l’application est disponible sur le Vision Pro. Mais durant la discussion, le son de Tom s’est déconnecté à plusieurs reprises, et il a du quitter puis rejoindre la réunion de nombreuses fois. Nous avons choisi de terminer l’interview avec nos bons vieux téléphones pour éviter les déconnexions.
Quelques jours seulement après son lancement, visionOS a déjà eu sa première mise à jour pour patcher ces bugs. Notamment pour les avatars Persona, qui sont assez perturbants. Le phénomène de la vallée de l’étrange est bien présent.
Le casque reste, pour l’instant, un produit de passionnés. “Avec un prix aussi élevé (3499$, soit environ 3 245 €), le casque n’est pas accessible du tout. Même si Apple a l’air de vouloir cibler les particuliers avec son marketing, pour l’instant, le Vision Pro est trop cher pour toucher d’autre gens que la classe moyenne américaine et les gens de la tech.” Tom considère cependant que le prix est cohérent avec la qualité du casque et l’innovation technologique.
Egalement à noter que contrairement aux autres casques VR, le Vision Pro ne vise absolument pas les gamers et offre moins de flexibilité dans son usage, compte tenu de l’écosystème “fermé” d’Apple.
Tom voit également une différence culturelle claire entre les USA et l’Europe. “Aux USA, tout le monde a un iPhone, ou des produits Apple. Alors qu’en Europe Android est bien plus présent. On est très frileux des produits Apple par chez nous, et surtout on est pas près à mettre autant d’argent dans un téléphone ou des écouteurs sans fil. Les Américains n’ont pas ce problème.” Il est donc logique pour la marque à la pomme d’avoir voulu lancer ce nouveau produit sur un marché qui lui est déjà acquis.
Pour l’ingénieur, faire tout ce chemin et dépenser tout cet argent pour obtenir le Vision Pro dès son lancement est un investissement professionnel. “Je compte développer des applications dessus et je ne voulais pas attendre qu’il arrive en Europe. J’en ai assez qu’on soit toujours à la traine de l’innovation et attendre un an, voire même plus parce qu’on ne connait pas encore la date de sortie, c’est hors de question.” Pour Tom, ce nouveau store qui ouvre est une opportunité en or dont il veut faire partie.
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